Comme cela doit être dur d'être annoncé comme un futur grand joueur à même pas 15 ans. C'est pourtant ce qui a pesé sur les épaules (solides) de Remi Lamerat. Son parcours ressemble d'abord à une autoroute vers le succès : recruté à Toulouse à 15 ans, international moins de 16 ans, moins de 17 ans, moins de 18ans, moins de 19 ans, moins de 20 ans, surclassé avec Toulouse avant même d'être majeur.
Les premières épreuves
Et si le chemin est aussi linéaire et fulgurant, c'est que le jeune homme a tout pour lui. Solide (1 mètre 85, plus de 100 kilos), explosif, rapide, technique. Il n'a pas encore joué une minute en professionnel que déjà, on le compare à Yannick Jauzion et Damien Traille.
Mais attention : le poids de l'attente est une chose de délicate à porter. Surtout pour un gosse. Alors qu'il doit intégrer l'équipe première après les blessures de Clément Poitrenaud et Vincent Clerc, en 2008, il se blesse lui aussi. La première d'une longue série...
Un nouveau départ à Castres
L'année suivante, la comète traverse le ciel du Top 14. Il était attendu depuis des années, mais son passage va être fulgurant. En trois saisons avec le Stade Toulousain, le centre ne dispute qu'une petite vingtaine de match. La faute à la concurrence, évidement. Mais aussi à une certaine fragilité, qui va lui faire enchaîner les blessures. Alors, après trois saisons en demi-teinte, Lamerat quitte Toulouse. Le voyage ne sera pas trop lointain : 85km. Direction Castres, le club dans lequel il doit s'imposer.
Seulement, la galère continue : Remi Lamerat se fait deux fois les croisés en deux ans. Et ses deux premières saisons sont blanches. Les années passent, le prodige tarde à s'imposer au haut niveau. Et pour tout dire, les premiers doutes surgissent même. Lamerat est-il tout simplement fait pour le rugby à haut niveau ? La question se pose, même quand il revient enfin. Après 5 saisons à ne pas jouer, ou presque, la route n'est plus aussi évidente. Le succès se rencontrera peut-être, mais par délà les détours empruntés et les chemins tortueux. Son séjour à Castres est ponctué par un titre. Une victoire face à Toulon qu'il regarde en civil. Blessé, encore une fois. Le déclic intervient l'année suivante
Le temps perdu ne se rattrape guère. Mais la fusée girondine est lancée : il s'impose enfin au centre de l'attaque, multipliant les charges et les chevauchées. Il dispute en une saison plus de matchs que dans toute sa carrière professionnelle. Lamerat marche sur le championnat et ne recule devant aucun adversaire. En 9 mois, il connaît tout : le bonheur d'être un joueur de rugby à temps plein, l'ivresse d'une finale de Top 14 (perdue, cette fois), la joie d'une sélection.
L'apogée : s'imposer chez les Bleus et briller en club
Avec les Bleus justement, Lamerat doit gagner sa place face à Fofana, Bastareaud, Fickou, Dumoulin, Mermoz, Danty, Vakatawa, David, Chavancy, Ntamack (qui débute au centre avec le XV de France)... Et pourtant, il va peu à peu s'imposer. Peut-être parce qu'avec Castres, puis Clermont, il dispute quatre finales en six ans. Probablement parce que son profil de puncheur puissant, de gros défenseurs et de courageux lui permet d'être associé à presque tous les autres sans rien altérer à ses qualités. Il est sommet de son art à quasiment 30 ans, bien loin des promesses de précocité qu'il avait suscité. Mais qu'importe. Avec l'ASM, en 2017, il remporte un troisième titre de Champion de France personnel, le premier en tant que titulaire
Rémi Lamerat aurait du être le meilleur joueur de sa génération. Pourtant, en raccrochant ses crampons, le buffle girondin n'aura aucun regret. Champion de France, international, titulaire lors d'une Coupe du Monde et indiscutable dans presque tous les clubs où il est passé. Quelques nostalgiques, ou de rares curieux, se poseront la question fatidique : et si ? Et si Remi Lamerat n'avait pas connu toutes ces blessures, aurait-il été le plus grand centre de tous les temps ? Une question qui restera sans réponse.
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